Patria, socialismo, trueke, venceremos !
Au Venezuela, tout est teinté du rouge socialiste. Les slogans socialistes et la figure emblématique du président Chavez sont partout, tagués sur les murs, arborant les péages, sur les panneaux qui nous accueillent à l’entrée des villes, posters dans les bureaux…on a même croisé une petite fille portant un tee-shirt à l’effigie du président. Alors que Chavez est hospitalisé à Cuba, un soir en allumant la télévision, on tombe sur un micro-trottoir où les passants font l’éloge de leur président, entre larmes et déclarations d’amour, Chavez est décidément la star du Venezuela.
Le réseau de troc est bien évidemment lui aussi socialiste, initié par Chavez, soutenu par le Ministère du Pouvoir Populaire pour les Communes et la Protection Sociale, inscrit dans la Ley organica del Sistema Comunal, et les porte-parole du réseau sont tous très engagés politiquement (contrairement à TAOA qui est engagé mais apolitique). Dans cette double page, nous relaterons des faits et partagerons avec vous les témoignages des acteurs du troc vénézuélien.
Le troc, un projet politique.
“El trueke no es el fin en si mismo sino que el fin es político porque nosotros y nosotras somos revolucionarios que queremos construir el estado comu-nal” (« Le troc n’est pas une fin en soi, la finalité est politique. Nous sommes révolutionnaires et voulons construire l’Etat Communal) – Yolanda, porte-parole nationale du réseau de troc du Venezuela.
Au Venezuela, le troc naît dans le cadre du projet politique de Chavez. Dès 2006, Chavez s’exprime publiquement sur le sujet : «un pourcentage de la production doit obligatoirement être destiné à un mar-ché communautaire où l’idée n’est pas de vendre dans une optique de profit économique. Et une autre partie de la production doit être vendue sur le mar-ché traditionnel pour pérenniser l’effort productif» (extrait d’une déclaration sur ViveTV).
La politique de Chavez repose sur les idées de Simon Bolivar, el libertador, redonner le pouvoir au peuple. El poder popular est le coeur de la politique de Chavez. Par ailleurs, le Venezuela est extrêmement dépendant de l’extérieur. Pour caricaturer, à peine, le Venezuela ne produit quasiment rien à part du pétrole et est contraint d’im-porter tout le reste.
Nous rencontrons une des déléguées du Ministère des Communes, Maria Teresa Quintana. Elle nous explique que Chavez, en favorisant l’émergence de différents modèles socio-productifs communautaires, dont les systèmes de troc, souhaite réduire la dépendance vis-à-vis des importations, que le pays devienne auto suffisant et puisse ainsi assurer son développement économique. Chavez veut donner les moyens et les outils au peuple pour que les communautés soient en mesure de produire ce dont elles ont besoin pour se nourrir, réapprendre à cultiver la terre
“La Constitution de la République Boli-varienne du Venezuela permet l’émergence de nouvelles formes d’organisation socio-productives (…) le modèle socio-productif communautaire et ses différentes formes d’organisation popu-laire sont basées sur des relations de production solidaires, via la mobilisa-tion des potentialités productives de la communauté, comme outil pour impul-ser le développement intégral du pays » Hugo Chavez, Ley para el fomento y desarrollo de la economia popular, août 2008.
Comme l’explique Américo Mata dans son livre Desafiando al dinero, las redes de trueke en Venezuela, los sistemas de trueke sont un des modèles socio-productifs impulsés par Chavez pour faire avancer la construction d’une économie socialiste, aux côtés des petites et moyennes industries, coopératives, entreprises familiales, unités de propriété socialistes, conseils communaux et autres formes et modèles d’associations communautaires et productives. De tels systèmes se basent sur la participation populaire pour ré-activer les économies locales, mettre en valeur le patrimoine culturel et économique des communautés, et satis-faire les besoins (sociaux et matériels) de chacun.
Le troc inscrit dans la Constitution
Si dans la plupart des pays, les monnaies sociales sont plus ou moins tolérées par le législateur (mais rarement officiellement légalisées), le Venezuela se distingue en inscrivant le troc dans sa Constitution.